Deux enjeux à prendre en compte
Le premier est le débat porté par les partisans ou adversaires, radicaux ou réformateurs, de l’alliance atlantique et du rôle de l’OTAN. Il s’agit de la place des capacités militaires et des industries de l’armement face aux conflits et situations de guerre.
L’autre enjeu est celui des moyens mis en œuvre et, au-delà, d’une vision des questions de sécurité élargie aux nouvelles dimensions du continent et des valeurs démocratiques, les dérèglements climatiques, la sécurité sanitaire, l’accès à l’eau potable, les migrations de masse planétaires. Autant de sources de conflits actuels et futurs dont la résolution dépasse le strict cadre national.
Une volonté politique au lendemain de la deuxième guerre mondiale
Après la deuxième guerre mondiale, la recherche de la paix a permis de se réconcilier entre pays européens, en créant progressivement un « commun » qui permet aujourd’hui de vivre ensemble entre voisins.
Une première tentative de créer une Communauté européenne de défense en 1954 est restée inaboutie. Celle-ci fût un échec car elle proposait une vision supranationale avec la constitution d’une armée européenne et des institutions placées sous la supervision du commandant en chef de l’OTAN, lui –même nommé par le président des Etats Unis.
Les ambitions au sein de l’Europe ont alors consisté pendant des décennies à développer des pratiques de coopération entre acteurs des domaines de la défense et des affaires étrangères de ses Etats membres. Il faut attendre 1998 pour voir se construire une politique européenne de défense (PESD), incluant une clause de solidarité, qui a permis de mettre en œuvre des opérations conjointes en Macédoine, au Congo et en Bosnie Herzégovine.
Au tournant du siècle, plusieurs structures ont vu le jour, dont un comité politique de sécurité (COPS), créé à l’instar de l’OTAN et réunissant des ambassadeurs de chaque Etat. Cette instance a permis une meilleure gestion de crises en s’appuyant sur une agence européenne de défense (AED) chargée de la coopération entre industries de l’armement.
Ce n’est qu’en 2022 que parait la Boussole stratégique, un premier Livre blanc sur la défense européenne qui renforce, par une analyse commune des défis et des menaces qui se posent à l’UE, la politique étrangère de sécurité et de défense.
Un révélateur des politiques communes et des clivages au sein de l’Union
Quelques années auparavant, en juin 2018, les ministres de la défense des pays membres lançaient l’Initiative européenne d’intervention, une tentative de réponse concrète aux situations de guerre, avec l’objectif de développer une culture stratégique commune. Dix pays européens ayant la capacité militaire et la volonté politique de tenir leur rôle sur la scène internationale (Allemagne, Belgique, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, France, Pays-Bas, Portugal et Royaume Uni) se sont alors joints à cette initiative afin d’améliorer la capacité des Européens à mener ensemble des opérations et missions militaires, dans un cadre multilatéral (UE, OTAN, ONU), ou ad hoc, sur l’ensemble du spectre des crises pouvant affecter la sécurité de l’Europe.
Le Fonds européen de la défense
Pour limiter la dispersion des efforts en matière de défense entre les Etats membres, la Commission européenne a créé un Fonds européen de la défense doté de 7,9 Md€ pour la période 2021-2027 (à titre de comparaison, loin des 58 Md€ de la PAC pour la seule année 2022 !). L’objectif affiché est de renforcer l’autonomie stratégique européenne, d’investir dans le développement des capacités et de l’interopérabilité selon les moyens de chaque pays, d’éviter les doublons, et de rapprocher les cultures stratégiques qui cohabitent en Europe. En outre, la Commission européenne a mobilisé un budget de 6,5Md€ pour développer l’interconnexion des transports de l’UE, afin d’améliorer les infrastructures stratégiques et de les adapter à la mobilité des hommes et des moyens matériels.
Les États membres de l’Union européenne auront ainsi consacré avec leurs budgets nationaux 270Md€ à la défense en 2023, contre 685Md€ aux Etats-Unis et 225 Md€ en Chine. Le budget de l’OTAN sera de 440Md€ en 2024.Le gouvernement français, pour sa part, a inscrit 47,2 Md€ à son budget défense 2024 et considère l’Alliance atlantique comme le fondement de la défense collective européenne.
L’Europe a-t-elle les moyens humains et matériels, et la volonté de poursuivre une politique de défense autonome au-delà de l’alliance atlantique et de l’OTAN ?
Au-delà de l’aspect militaire, quelles sont les priorités de sécurité civile au sein du continent européen ?
Plus :
L’Europe de la défense MAEE
10 points sur la défense européenne en 2023 - Le Grand Continent
L’Europe de la défense, ça existe, et ça marche ! - Commission européenne
L’Europe qui se fait - Chapitre 13. Qu’est-ce que l’Europe de la défense ? - Éditions de la Maison des sciences de l’homme
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