Un système immobilier municipal à bout de souffle
L’abandon du projet de rénovation Malraux et l’incendie récent de l’ancien hôpital de jour illustrent l’impasse où végète le modèle de rénovation immobilière d’une municipalité qui veut résorber à moindre coût les friches immobilières qui parsèment son centre ancien. Ce modèle confie la restauration des immeubles ou parcelles en déshérence à des promoteurs ou à des opérateurs privés avec des conditions d’achat particulièrement attractives pour que le système de défiscalisation Malraux leur fasse espérer ainsi de confortables plus-values.
Illustration des promesses non tenues du promoteur pour la restauration de l’ancien hôpital de jour
Une opération réussie mais au détriment d’un riverain
La seule rénovation réalisée à Pontoise grâce au dispositif Malraux fut celle de la belle maison ancienne quincaillerie Duvivier, rue Prachay en face de la bibliothèque municipale. Mais c’est sans aucun doute parce que la taille de la parcelle permettait de l’accompagner d’un immeuble neuf.
Il faut cependant rappeler qu’en site ancien de côteau et de terrasse il faudrait veiller à ce que les constructeurs soient précautionneux et compétents. Ce ne fut pas le cas pour cette rénovation/construction. En effet dès le 1er jour de creusement l’arasement des fondations de la maison riveraine en contrebas a causé de graves dégâts. Ses propriétaires n’ont obtenu réparation qu’après dix ans de procédure sans le moindre appui de la Ville qui se défaussait de toute responsabilité : « La parcelle est vendue, c’est devenu une affaire privée. »
Un système trop dépendant des fluctuations financières
Malheureusement ce système ne fonctionne que lorsque la spéculation immobilière est au plus haut et les taux d’intérêt au plus bas. Ce n’est plus le cas et le marché immobilier est entré maintenant dans une crise profonde. Le prix des logements a atteint de tels sommets que les acheteurs se font rares. De plus l’envolée des taux d’intérêt freine autant les acheteurs particuliers que les investisseurs qui ont beaucoup de peine à financer leurs projets. L’activité immobilière s’en ressent fortement depuis presque deux ans.
C’est ainsi que le projet de rénovation de l’’immeuble qui domine le quartier Notre-Dame, l’ancien hôpital de jour, a avorté. Le projet publiquement vanté le 5 juin 2023 a été discrètement abandonné la même année. Et l’immeuble de nouveau abandonné a subi le 16 octobre 2024 un incendie dégradant fortement charpente et planchers.
Un refus persistant d’envisager les projets alternatifs, citoyens ou sociaux.
En 2016 le maire de Pontoise n’avait pas voulu étudier le projet des étudiants en architecture pour l’ex-hôpital de jour et il avait signé un arrêté de péril pour pouvoir les expulser.
Sur l’îlot Harengerie il avait refusé d’envisager en 2012 un petit projet citoyen de 8 logements au bénéfice d’un projet classique plus important. « Laissez les promoteurs promouvoir et les constructeurs construire » avait indiqué Philippe Houillon le Maire d’alors à ces habitants motivés qui lui proposaient un projet financé respectueux du quartier.
Mais comme cela avait déjà été le cas depuis 1991 de divers projets sur l’îlot de la Harengerie, le projet commercial de 2012 a avorté. L’officialisation de l’abandon en 2016 a permis à l’association de quartier d’obtenir un bail précaire pour installer son jardin partagé sur le champ de ruines escarpées.
Constatons qu’en 2024 aucune des bâtisses abandonnées du secteur n’a encore été rénovée mais qu’un nouveau projet moins important mais tout aussi rutilant a été présenté aux habitants du centre ancien.
Les choix des élus pontoisiens ont été tout aussi inefficaces pour l’ex-tribunal annexe rue Pierre Butin désaffecté en 2005 après l’inauguration de la cité judiciaire départementale. Cet immeuble avait été construit pour un usage provisoire en 1984 par le département du Val d’Oise. en prévoyant un changement d’usage facile grâce aux plateaux libérables de toutes les cloisons.
Là aussi une vente pour transformation en résidence classique, vantée en réunion publique auprès des habitants du quartier par la Ville, avait été abandonnée (discrètement) par le promoteur.
Là aussi , une transformation en un foyer étudiant avait été refusée par la majorité droitière du dernier mandat Houillon. C’était apparemment un projet trop social pour Pontoise alors que c’est la mission du Conseil Général. Sans doute les besoins locatifs sociaux des pontoisiens du centre ville de Pontoise n’importent pas pour ces élus pontoisiens, qu’il s’agisse des jeunes en formation ou des personnes âgées.
Preuve est faite mais quand comprendront-ils ?
Manifestement les sites du centre-ville intéressent les promoteurs avec l’appui du dispositif Malraux. Ils proposent donc à la ville de Pontoise de belles esquisses avec promesses de parking et extensions décoratives qui flattent la vanité urbanistique des élus.
Mais une fois la promesse de vente obtenue, les mêmes promoteurs finissent rapidement par reculer à l’estimation affinée des coûteuses difficultés de réalisation. Celles-ci leur interdisent toute commercialisation fructueuse.
Il est plus que temps que les élus pontoisiens optent pour des rénovations modestes dans les quartiers anciens avant que les dégradations deviennent irréversibles.
Pour aller plus loin : https://www.defiscaliser-loi-malraux.fr/programme-malraux-pontoise-95500.php#/tax-amount
Quelques exemples de projets promis et abandonnés depuis :
https://www.pontoisensemble.asso.fr/La-reunion-de-quartier-Pontoise-Centre-du-26-mai-2016
https://www.pontoisensemble.asso.fr/Nouveau-projet-pour-l-ex-tribunal-annexe-rue-Pierre-Butin
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